Faut-il s'arrêter de rêver ? Mars 2025

La terre que je convoitais et sur laquelle j'avais déployé des espoirs depuis un an n'est plus en vente.

La ferme de la Houle
5 min ⋅ 30/04/2025

Faut-il s’arrêter de rêver ?

I. Aujourd’hui, mes petits oiseaux se sont éteints ; ma persévérance, jamais.

La terre que je convoitais et sur laquelle j'avais déployé des espoirs depuis un an n'est plus en vente

Dans les Hauts de la Houle, vous ne verrez surement pas le pique-nique géant que j'aurais aimer organiser. Vous ne goutterez surement pas aux liliacés ; ail de Cancale, oignons de Cancale (bon peut-être que si sur mon autre petite parcelle, mais il y en aura pas pour tout le monde!). Je rêvais d'y emmener mon fils, ses copains et copines de la crèche pour s'y balader, et, surtout, cultiver cette terre si arable.

Je vous dis mes rêves tels qu'ils sont, j’avais mille idées pour cette parcelle !

L’agriculture, un milieu silencieux où l’on entend le bruit de vent qui siffle délicatement nos tympans mais il vous est impossible d'ouïr convenablement ce qui se dit.

Je ne sais pas concrètement pourquoi la parcelle n’est plus en vente et je ne préfère pas en savoir plus pour le moment. Malgré tout, je comprends mieux le système sur lequel repose la société car ma petite histoire est une brindille dans l'océan des terres agricoles. Mais des histoires comme celle-ci, il en existe des milliers, surement à des échelles qui me dépassent. L'accès au foncier agricole est notre fin qui sera notre faim car c’est la première raison de l’abandon des projets agricoles.

J’espère pouvoir réussir à convaincre les propriétaires un jour. Malgré tout ce que l’on peut penser, la terre que l’on a, on l’emprunte à nos enfants.

📝 Note : je suis en train de lire le roman graphique “Champs de bataille” (cf. image de couverture) qui évoque l’histoire du remembrement ; quand je vous parlais d’histoires à d’autres échelles, en voilà une ! C’est un sujet passionnant et qui marque, selon moi, un tournant dans nos sociétés. Je serai ravi d’échanger avec des personnes qui ont vécu le remembrement pour une vision empirique !

Une utopie de perdue, c’est 3 nouvelles de créées !

Je comprends mieux que nous soyons, nous, jeunes, considérés comme utopiste car notre utopie n'est utopie seulement car on nous brise nos rêves. Je ne demandais pas grand chose, un lopin de terre pour y tenter d'y développer un projet paysan. Je ne souhaitais que partage, coopération, transmission et apprentissage.

Je ne sais pas quel combat m'anime, peut-être celui de préserver au mieux l'avenir de mon fils, des enfants d'aujourd'hui et de demain, mais cette bataille de perdue amplifie mon utopie 💪

À ce titre, et parce qu’il y a en marre de cette morosité, j’ai décidé de semer quelques graines de positivisme :

  • Achat de terres en collectifs : et si vous étiez sociétaires et que vous soyez aussi propriétaires de terres agricoles ? À l’image de plusieurs initiatives, dont une assez proche de Cancale, à Sains : la coopérative Terres d’ici. Et si la terre était considérée comme un bien commun ?

  • Rapprocher producteurs, porteurs de projets et propriétaires de terres agricoles : aujourd’hui, des jeunes et moins jeunes attendent que des terres agricoles se libèrent pour s’installer. Compte tenu de la pression foncière et immobilière à Cancale et dans la région, il n’y aura statistiquement plus de paysans dans les années qui viennent. Alors c’est à vous de jouer, si vous avez des terres agricoles ; des maraîchers, des viticulteurs, des horticulteurs, des agroforestiers attendent patiemment ! C’est maintenant que nous sommes motivés ! Contactez-moi, je peux transmettre en respectant vos souhaits, je l’ai déjà fait dernièrement.

  • La troisième idée est en cours d’idéation. Un peu de suspense !

II. Sinon, quelles sont les autres actualités ?

Le 30 avril pour une lettre d’information du mois de mars ! Procrastination ou manque de temps ? Allez, on reprend rapidement :

Comment faire du sport, de la méditation, entretenir son mental, capter du CO2, préserver la biodiversité et nourrir le monde ?

Devenir ouvrier agricole. Plus besoin de séances de sport quand on épand 8 remorques de compost (on cherche un épandeur à la ferme Benaise!), plus besoin de méditation quand on passe 2 heures à récolter des pois mange-tout. Je suis simplement ouvrier agricole à la ferme Benaise à Saint-Malo, et c’est la meilleure thérapie qui soit. J’ai l’impression d’être exactement là où je devrais être et j’y suis quand même 4 jours par semaine ! Je me sens à ma place, un grand merci à Lucie, Gaultier et Gilles de m’avoir accueilli sur la ferme ! Une très belle occasion de gagner de l’expérience et connaitre aux mieux la réalité de ce métier.

On cherche un épandeur d’occasion !

Je serai ravi à l’occasion de vous y voir, pourquoi pas y organiser une visite pour les plus curieux ! En tout cas, vous pouvez venir y acheter vos légumes, les légumes d’été sont en train de pousser ! 🍅

Vous vous demandez à quoi sert vos impôts et les associations ?

Voici un exemple concret.

Grâce à des subventions, l’association Ici Cultivons Demain a investi dans du petit matériel agricole que je vais pouvoir tester sur mes terrains. C’est un kit maraîchage qui m’est attribué pendant une période d’un an et qui sera par la suite concédé à un nouveau porteur de projet. C’est une superbe opportunité car le matériel agricole coûte la peau des fesses ! Vous avez déjà vu une brouette à 300 euros ? Maintenant, oui.

Vous cherchez un producteur dans le coin ?

Le guide des producteurs et produits locaux.

Une belle initiative de Saint-Malo Agglomération : réunir tous les producteurs sur une carte interactive et en papier aussi ! J’étais au lancement en présence du maire de Cancale. J’ai pu y retrouver des producteurs du coin. À vous de jouer pour trouver votre producteur !

Conférence : “quand le manque d'eau nous rassemble et transforme nos paysages ?”

Bon, encore une fois, ce n’est pas un sujet très marrant. Vous allez vous dire “mais il ne va que à des conférences de fin du monde !” Ne vous inquiétez pas, je suis récemment allé voir Pierre Thevenoux au Phare à Saint-Coulomb, très marrant, je vous recommande son spectacle ! Puis j’ai mes 2 clowns à la maison ! Bon revenons-en à la pénurie d’eau qui arrive peut-être ! 😅

Étaient présents : Emma Haziza - hydrologue et experte des enjeux liés à l’eau, Jean-François Richeux - Président Eau Pays de Saint-Malo, Séverine Bourserie - Directrice les Eaux de Beaufort, Nadia Dupont - Maîtresse de conférence en Géographie, animée par une personne de chez Veolia.

Voici mes notes durant la conférence, je n’ai pas eu le temps de vérifier les informations :

  • Consommation : 30.000 litres par an/citoyen, objectif de 18.000 par an/citoyen d’ici 2030,

  • Manque d'eau 1 année sur 2 en Ille-et-Vilaine,

  • Approvisionnement en eau grâce aux autres communes : La Boussac, le Tronchet, Plancoët,

  • 9 million de m³ d'eau vendu dans le Pays de Saint Malo en 202* dont 1 million venait de Plancoët,

  • Solutions évoquées : préserver les zones humides, désimpermeabiliser les bassins versants, fonds de vallées à préserver, prendre des douches de 4 minutes etc..

Je ne vais pas rentrer dans le détail, j’aimerai accéder à des chiffres plus concrets pour mieux analyser la situation. La conférence a été filmée, j’espère qu’elle sera mise en ligne !

Et un nouveau certificat validé !

J’ai validé ma formation de 96h sur : “intégrer l’agroécologie dans son activité agricole” ou Maraîchage Sol Vivant. Je vous en conjure, apprenez, apprenez ! Quel plaisir de comprendre notre système en partant de la base : la vie du sol ! Partir de l’infiniment petit pour en venir à un champs de 10000 m2, entre la théorie et la pratique maintenant, j’ai un peu de travail ! 🙃

Aujourd’hui, entre un diplôme d’école de commerce et celui de responsable d’exploitation agricole, je crois être très fier de faire partie de la famille des agriculteurs, et quand je dis ça, je parle de tous les agriculteurs ! Car effectivement, je parle beaucoup de maraîchage petite surface mais je soutiens les éleveurs, les bios, les conventionnels, la grande culture, ceux du bout du monde comme ceux à côté de chez moi ! Sans quoi, nous ne mangerions pas ! 💪

Paysannes du Laos. Crédit : Robin.

Alors ! La conclusion de ton analyse de sol de Terrelabouët ! D’puis le temps !

Je sais que vous attendez avec impatience le résultat de la visite de l’agronome d’Agrobio 35 concernant ma parcelle de Terrelabouët ! La voici : “avis plutôt défavorable pour du maraîchage” 😅 Bon, ce n’était pas si brutal et puis, j’en suis un peu conscient. Victoire d’Agrobio 35 a pris le temps de faire une enquête terrain pour constater l’état de ma parcelle.

Sur le bas de la parcelle, on est carrément proche de la vase : non-cultivable. Le sol était encore gorgé d’eau (contrairement à ma parcelle des Hauts de la Houle) : il se réchauffera difficilement ; les matières organiques pourront avoir du mal à se dégrader ; il faut absolument exporter le Saule après la fauche etc… Bref, il paraît que les bretons sont têtus ? Je vais quand même essayer de cultiver, mais je ne suis pas fou rassurez-vous, je vais essayer sur petite surface, sur 250 m2 par exemple.

Quelques photos du sol :

On voit que la matière organique est bloquée sur la photo de droite.

Quelques traces de rouille (orange)

Alors, faut-il s’arrêter de rêver ?

Jamais, au grand jamais.

Robin ✌️

Pour les enfants de la terre.

La ferme de la Houle

Par Robin G

À qui s’adresse la ferme de la Houle ?

Aux habitants de la commune de Cancale qui souhaitent manger des légumes de leur commune mais pas que.

Aux curieux, à ceux qui se posent des questions, à ceux qui ont toutes les réponses, à ceux qui rêvent de changement, à ma génération, aux plus jeunes et moins jeunes, aux cols blancs et cols bleus, aux conseillers bancaires comme aux ouvriers du bâtiments, aux futurs agriculteurs, à ma femme, à mon fils qui lira surement ces lignes un jour !

Qui suis-je ?

Robin, la trentaine, ex-banlieusard dans le 78.

Je travaillais par le passé dans le secteur tertiaire, dans le monde des startups en tant que Growth Manager - manager de la croissance - derrière un bureau, devant un écran plus de 8 heures par jour, jusqu’au jour où j’ai tout arrêté.

Maintenant, je suis paysan-maraîcher (j’essaie) sur la terre de mes ancêtres, à Cancale, là où l’histoire de ma famille a commencé et où finira surement la mienne.

C’est l’histoire d’une révolution systémique.