Les nouvelles du mois de novembre 2024 de la ferme de la Houle.
Cela faisait un moment que je n’avais pas donné de nouvelles ! J’ai préféré rester discret jusqu’à aujourd’hui pour une raison simple que vous découvrirez dans cette lettre.
J’ai décidé, et je le souhaitais depuis un moment, développer un nouveau canal de communication : le mail, plus précisément, une lettre d’informations. Car je la trouve plus intime et j’aime écrire des formats longs. Je souhaite donc vous partager les réalités systémiques de mon projet agricole ; que je conçois comme un projet sociétal car il imbrique de nombreuses choses.
Alors, la ferme de la Houle, elle en est où ?
Pour les personnes qui découvrent la ferme de la Houle, je vous conseille de vous reporter à la section À propos !
Suite à mon premier potager maraîcher réalisé avec de l’aide dans les Hauts de la Houle, j’en garde du positif mais pas que. Il me permet d’anticiper la suite et d’éviter des erreurs mais surtout de me confronter à petite échelle à la gestion d’une parcelle. Si vous l’avez remarqué, j’ai débâché certaines planches. Cette parcelle me permet d’expérimenter plusieurs choses.
La pratique maraîchère
Mettre les mains dans la terre, voir les plantes se développer, reconnaître les bio-agresseurs… avancer pas à pas me permet de tâter le terrain, c’est une approche très importante pour moi. C’est une stratégie par l’apprentissage à petite échelle. Je ne pourrai pas apprendre le métier en une seule fois. Certains maraîchers sont encore en apprentissage au bout de 8 ans ; c’est le métier d’une vie.
Le travail collaboratif
Durant cette période, j’ai essayé de me rapprocher des acteurs de l’agriculture locale. Cependant, mettre en place un système coopératif est un travail de longue haleine, il me faudra encore du temps pour développer mon réseau mais j’ai engagé très récemment une initiative afin de regrouper les porteurs de projet du territoire.
En parallèle, j’ai fait appel à des agriculteurs implantés sur le territoire depuis longtemps, et grâce à eux, certaines tâches qui pourraient me prendre des journées se font en quelques heures. Un agriculteur de Saint-Coulomb a passé “un coup de rota” - Rotavator - et un autre agriculteur m’a aidé à déplacer 3 tonnes de paille (heureusement). Merci aussi à la généreuse donatrice des ballots de paille !
Un grand merci à eux.
Tester la commercialisation à petite échelle
Grâce à ce potager, j’ai pu tester 3 canaux de commercialisation : vente à la Houle dans mon garage, vente en ligne sur CoopCircuit, vente au champs via les évènements “Ramasse ta courge!”.
Cette parcelle de 1500 m2 m’a permis de générer un chiffre d’affaires de 3400 € sur un prévisionnel de 5660 €, soit la réalisation de l’objectif théorique à 60%. C’est plutôt un bon résultat mais ça reste loin des prévisions (et surtout sans les charges…). On parle souvent, et théoriquement, d’une perte de 40% de la production entre la plantation et la commercialisation, on dirait bien que la théorie et la pratique se confirment !
Ci-dessous, une rapide vue des planches de culture - j’avais environ 30 planches de 30 mètres par 1 m de largeur et 0,5 m de passe-pied.
Mise en place des couverts végétaux
Comme vous l’avez peut-être vu, j’ai remplacé les légumes d’été par des couverts végétaux. Sur certaines planches, vous verrez pousser de la vesce, de l’avoine ou de la moutarde.
Pourquoi ? C’est un principe agroécologique qui a pour objectif à terme de redonner cet engrais vert à la terre - j’ai exporté des légumes du sol, il faut que j’importe de la nourriture au sol - à terme, les engrais verts ou couverts végétaux seront couchés et occultés par une bâche d’ensilage, ainsi tous les micro-organismes se délecteront de cette matière organique. L’idée est d’alimenter l’activité biologique des sols et surtout, de ne pas laisser un sol nu. Je pourrais vous en parler des heures sur l’intérêt de mettre des couverts végétaux. Je laisse aussi des parties en enherbement spontanée et d’autres avec des bâches afin de mener des expériences différentes.
Maintenant, il faut préparer la suite ! Que vais-je planter dans la parcelle des Hauts de la Houle ? Le contexte évolue et j’ai quelques idées pour la suite mais j’ai encore des zones d’ombres.
D’ailleurs, le calcul stratégique d’une exploitation maraîchère est assez complexe :
Vais-je planter des plantes pérennes sur une terre qui ne m’appartient pas ?
Vais-je avoir un accès à l’eau de manière pérenne ?
Imaginez simplement que vous soyez locataire d’une parcelle agricole : vous devez avoir un accès à l’eau, vous devez donc potentiellement faire un forage qui coûte approximativement 15000 € sauf que vous n’êtes pas propriétaire de la parcelle. C’est comme si vous deviez mettre en place une pompe à chaleur dans votre logement d’une certaine amnière, à vos frais, alors que vous êtes locataire !
À l’occasion de l’automne, je me suis lancé dans plusieurs démarches administratives concomitantes - un vrai parcours du combattant, ou comme je l’ai dit à Monsieur le Maire de Cancale par courrier “un parcours du condamné” tellement le chemin est long.
J’ai poursuivi mon cursus en m’inscrivant au parcours 3P (parcours obligatoire avec la Chambre d’Agriculture) ; j’ai monté mon dossier d’autorisation d’exploiter à la DDTM (autorisation accordée!); je suis actuellement une formation technique de 10 mois sur le maraîchage sol vivant ; j’ai créé en parallèle ma petite entreprise et entrepris les démarches administratives telle que mon affiliation à la MSA (sécurité sociale des agriculteurs) ; je continue à m’équiper avec du matériel d’occasion dont l’achat d’une remorque (1300€ - prix d’ami, merci) et la récupération chez un éleveur de 3000 m2 de bâche d’ensilage (gratuitement mais location d’un utilitaire 100€) ; j’anticipe la certification de ma parcelle par un organisme certificateur (400€/an) ; j’ai adhéré à l’association Agrobio 35 qui viendra faire une analyse de mon terrain (90€/an) ; j’ai fait des demandes de devis avec des laboratoires pour des analyses de sol physico-chimiques (200€) ; je discute avec différentes associations dont Ici Cultivons Demain qui avait financé 1600€ de matériel pour les Hauts de la Houle ; j’ai aussi rencontré du personnel de Saint-Malo-Agglomération ; je consolide mon prévisionnel et mes investissements ; je me rends à des conférences, dont une à Quévert avec Marc-André Selosse, Professeur au Museum d’Histoire Naturelle (si vous voulez améliorer votre vision du monde, je vous invite à regarder sa conférence), et sinon, j’ai plus de 500 kilogrammes de courges dans ma cave a écouler et je ne m’en suis pas occupé.
Je commence à comprendre la charge mentale du maraîcher, et encore, je n’ai pas démarré ! La charge administrative est à la fois simple mais très prenante : un dossier en entraine un autre etc… Il y a de quoi abandonner.
Je prépare du mieux que je peux les futurs jardins que je vais exploiter à Terrelabouët. Car oui, et c’est la raison de mon silence, c’est maintenant officiel : j’ai signé mon bail rural de location de terres agricoles - 9535 m2 - à Cancale (410€/an) ! 🎉 C’est un moment historique à titre personnel, je deviens chaque jour qui passe un peu plus un agriculteur - et j’en suis fière.
Je réfléchis donc à l’ergonomie du lieu pour être le plus efficace possible. C’est un enjeu crucial pour la ferme, et comme vous le voyez, je me suis remis 10 fois à la tâche pour trouver le bon design de la ferme comme la localisation des serres, taille des planches, taille des jardins, lieu de vente etc… mais il me manque des choses essentielles : l’accès à l’eau, l’électricité mais aussi et surtout, définir la qualité de mon sol - vais-je pouvoir cultiver dessus sereinement ? J’ai une inquiétude car le terrain est couvert de pousse de Saule qui désigne une parcelle plutôt humide, si vous êtes biologiste ou botaniste, n’hésitez pas à m’envoyer un message pour qu’on en discute !
Parcelle de Terrelabouët
Le terrain de Terrelabouët est d’une importance primordiale car c’est une terre agricole (A en urbanisme) c’est-à-dire qu’il est possible de mettre des serres (sous réserve d’acceptation de la mairie, un nouveau dossier à faire). Les serres peuvent représenter jusqu’à 80% du chiffre d’affaires d’une ferme maraîchère, elles sont donc primordiales. Maintenant, la question est de savoir : vais-je installer des serres en 2025 ?
Pas d’inquiétude, mon projet de la ferme de la Houle est fondamental et d’une symbolique forte. Je me bats actuellement pour que mon projet avance auprès de différentes instances. C’est assez lourd à expliquer, je ne rentrerai pas dans les détails pour le moment mais il se peut que je puisse faire appel à vous pour du soutien. Alors, inscrivez-vous à ma lettre d’informations et partagez-là !
Je pourrais tenir cette newsletter sur des pages et des pages mais il est important que je me raisonne et que cette première version soit à votre goût.
Je vous laisse quand même avec un reportage d’ARTE sur le Bio, la crise de foi :
N’hésitez pas à consulter la section À propos mais aussi ma page facebook pour suivre l’actualité et n’hésitez pas à transférer cet email directement à vos contacts :)
Dans cette lettre d’informations, je vous parlerai de tout !
Robin ✌️
Pour les enfants de la Terre.