De la courge spaghetti au prévisionnel financier - Janvier 2025

Le mois de Janvier fut interminable, vous ne trouvez pas ?

La ferme de la Houle
7 min ⋅ 07/02/2025

De la courge spaghetti au prévisionnel financier

Ce titre résume plutôt bien la vie des agriculteurs que j’ai rencontré. Tu peux passer d’une récolte de patates le matin à un rendez-vous avec la MSA (Mutuelle Santé des Agriculteurs) l’après-midi tout en devant réceptionner 20 tonnes de compost.

Allez, on démarre les choses sérieuses ! Et merci de me suivre pour les plus courageux. Avec le temps, j’espère que mon modèle de communication se structurera. Faites-vous une tisane, il va falloir s’accrocher !


🧺 Offre de déstockage de courges : 6 euros le panier de courges comprenant : 2 courges spaghetti, 2 kg de potiron, 1 pâtisson. Commandez en répondant à ce mail ou au 0665010678, je peux vous livrer sur Cancale ! 


Introduction : Leboncoin, le site de rencontres de demain ?

Je vais commencer cette lettre d’information par un évènement tout à fait anodin : une vente Leboncoin. Jusque là, rien d’incroyable. Pourtant, quasiment toutes mes rencontres Leboncoin se terminent en conversation de comptoir. Cette fois-ci, elle ne fut pas particulièrement longue mais assez directe ; comprenant que je me lance en maraîchage, mon interlocuteur me pose la question suivante : “qu’est-ce qui vous a poussé à faire cette reconversion ?”. Hop là papillon ! Mes réseaux synaptiques s’entrechoquent - la réponse à cette question est gorgée de simplicité complexe. Autrement dit, je peux vous répondre en 1 phrase comme je pourrais y passer plusieurs jours. Je vous apporte un premier élément de réponse, très simple et très basique : la photo ci-dessous.

Ferme dans les steppes mongoles

Il m’a fallu être à 8700 km dans une ferme en Mongolie pour comprendre la réalité du terrain. J’ai travaillé dans les champs, tiré le lait et tenté de dresser des chevaux semi-sauvages. Autant vous dire que les conditions étaient rustiques mais c’est la plus belle expérience de ma vie, et c’est ce jour-là que j’ai compris que je voulais être paysan.

Ces vaches alimentent en lait un village. Chacune d’entre elle avait un prénom, et je ne vous cache pas qu’on s’y attache. La livraison se faisait en pick-up dans des pots au lait. Si vous voulez voyager un peu au fin fond des steppes mongols, voici un enregistrement musical du parcours en pick-up jusqu’à la yourte qui sert de camp pour surveiller les vaches - écoutez-le en lisant !

Après cette expérience, tous mes héros d’enfance sont devenus obsolètes. Aujourd’hui, quand je vois un agriculteur, je vois un vrai super-héros. Alors après avoir baigné 2 ans dans le milieu agricole, tant sur la partie formation que sur le terrain, je suis arrivé à cette même conclusion de Bruno Parmentier :

Linkedin de Bruno Parmentier

Partie 1 - Les Hauts de la Houle : “tu vas nous tenir au courant ?”

Et bien, non ! 😂

Je suis en hivernage. Ce n’est pas entre mes mains - ça ne l’a jamais été d’ailleurs ! J’aurais des nouvelles dans quelques jours, voire quelques semaines, voire jamais… Beaucoup de gens m’ont apporté leur soutien et je vous en remercie. Vous savez, et je veux que tout le monde en soit témoin, j’essaie simplement d’acquérir des terres pour développer une activité de paysan-maraîcher et produire des légumes.

Je suis tombé sur cette enquête de Splann sur l’artificialisation des sols sur les côtes bretonnes. Je n’ai pas tellement d’avis, je ne suis pas expert mais je souhaitais souligner un élément factuel de notre magnifique région : nous sommes catégorisés comme Nord Légumier, c’est-à-dire que l'agriculture y est favorable d’un point de vue pluviométrie, ensoleillement, climat doux … C’est un patrimoine climatique exceptionnel ! Malgré parfois cette petite pluie fine qui vient se poser sur le bout du nez, je vous l’accorde !

Cela m’évoque l’exemple de la couronne d'île de France, qu’on appelait aussi la couronne maraichère, qui comptait 2500 maraîchers en 1912, et qui n’en compte aujourd’hui plus que 74. J’ai moi-même rencontré une agricultrice dont ses parents ont été expropriés de Maisons-Laffitte. Ainsi, on retrouve généralement des maraîchers qui s’éloignent des villes, des côtes, vers des terres potentiellement moins arables pour finalement venir vendre, et vous l’avez deviné… en centre urbain.

Plus on s’éloigne, plus notre temps passé en commercialisation s’allonge, moins nous sommes au champs, et les conséquences peuvent être diverses et variées. Je m’étendrais sur le temps de travail en agriculture à un autre moment.

Les Hauts de la Houle, quelle vision ?

Je continue à développer mon projet utopique des Hauts de la Houle. J'étudie quelle parcelle de la Houle pourrait accueillir la meilleure production : légumes de plein champ, fruitiers, aromatiques, petit-fruits. Il y a une véritable opportunité pour les Cancalaises et Cancalais.

Ce projet prendra du temps et de l’énergie mais je compte bien, tant que je vis ici, y développer un projet agricole, voire aussi de sensibilisation à l’environnement !

N’est-il pas important de savoir d’où vient l’oxygène que nous respirons ou bien comment se forment les aliments que nous mangeons ? Autrement dit, ce de quoi dépend nos vies, rien que ça !

En parlant de foncier 💸

J’ai quelques oiseaux parfois qui me rapportent que certaines personnes détiennent des terres et souhaitent potentiellement les vendre sur Cancale. Sachez que je suis à votre écoute, vous pouvez me contacter par mail à fermedelahoule@gmail.com ou par téléphone au 0665010678 - je m’engage à respecter une confidentialité totale.

Vous pouvez consulter les estimations de prix de la SAFER sur le site www.le-prix-des-terres.fr, c’est accessible gratuitement.

Partie 2 : avant de s’installer, s’entourer et se former.

Une recommandation des différents organismes agricoles : ne pas s’isoler quand on travaille dans l’agriculture. Cela peut paraître basique mais c’est le premier conseil que l’on nous donne.

L’association Ici Cultivons Demain

Je suis en contact régulier avec l’association Ici Cultivons Demain de Saint-Malo, qui a pour objectif de favoriser l’installation de jeunes agriculteurs. On essaie d’avancer ensemble, si tout se passe bien, une synergie pourrait s’opérer. J’en dirais plus prochainement mais n’hésitez pas à les suivre et les soutenir ! En espérant qu’elle perpétue son travail !

C’est grâce à eux que j’ai obtenu un kit de maraîchage pour mon potager des Hauts de la Houle !

Formation MSV

Comme évoqué rapidement, je suis actuellement en formation Maraîchage Sol Vivant. C’est une pratique qui a quelques années déjà et qui a pour objectif de développer un système maraîcher sur petite surface grâce à une stratégie d’auto-fertilité des sols (et bien plus encore). En gros : faire en sorte d’agrader (améliorer) un sol pour maximiser les rendements au mètre carré tout en respectant les différents cycles naturels et surtout, le sol. Plus concrètement, l’objectif est d’augmenter le taux de matière organique dans le sol - un peu comme un sol forestier pour faire simple.

Alors, j’avais écrit tout un pavé mais compte tenu de la longueur de ma lettre, j’ai décidé de le supprimer. Je reviendrai dessus mais à travers ma formation, j’ai la chance d’avoir des témoignages de diverses fermes maraîchères qui ont des modèles tout à fait unique sur petite surface comme Les Jardins du Wiedenthal qui réalisent environ 72.000€ d’euros de chiffre d’affaires sur 4600 m2, il faudra évidemment contextualiser pour bien comprendre. Le chiffre d’affaires ne signifie pas grand chose sans analyse.

Parcours 3P

Ces dernières semaines, j’ai réalisé mon parcours 3P. Un parcours obligatoire organisé par la Chambre d’Agriculture. On s’y retrouve entre futurs installés ; laitier, grande culture, maraîcher, en bio ou en conventionnel, pour discuter des différents aspects de l’installation, et j’ai bien aimé.

On réfléchit à son projet, sa cohérence et ses objectifs personnels. On développe aussi une partie souvent peu abordée mais qui est centrale pour moi : le facteur humain, et notamment les interactions entre les choix professionnels et la vie privée. Un vrai sujet que l’on aborde en famille, car, comment partir en vacances en été, période de production et de travail intense ? Tout le schéma lié au salariat/CDI est revu, et c’est un vrai sujet.

L’installation est plutôt complexe, et même la DDTM - Direction départementale des territoires et de la mer - qui est intervenu nous confie ne pas avoir tous les éléments en tête, car il faut s’adapter à la PAC - Politique Agricole Commune. Je ne rentrerai pas dans tous ces détails bureaucratiques qui vous feront vous désabonner mais sachez qu’il faut quand même avoir quelques classeurs vides de disponible avant de se lancer !

S’associer ?

Un vieux rêve a fait son retour pendant ce parcours 3P ; celui de monter un projet à plusieurs !

Depuis que j’ai démarré ma reconversion, et même avant, j’ai toujours voulu avancer avec un ou plusieurs alter-ego. Ma conclusion personnelle revient à dire qu’un système agricole est beaucoup plus résilient et performant quand celui-ci est conduit par plusieurs personnes. Il faut quand même connaître un paquet de choses quand on fait 60 légumes !

Alors, si une âme agricole, dont la particularité est de connaître les itinéraires techniques des légumes avec une appétence pour le MSV, c’est l’occasion de se boire un café ! 🤩

Partie 3 : mettre les mains dans la terre bon Diou ! Et se préparer.

Jeune Cancalais recherche expérience agricole !

Afin de monter en compétences, je suis à la recherche d’un mi-temps en maraîchage diversifié (2,5 jours par semaine) dans une exploitation maraîchère existante. L’idée est de pouvoir me former tout en développant mon projet d’installation progressivement. Si vous entendez parler de quelque chose, ça m’intéresse !

Analyse de sol de mon terrain à Terrelabouët

Sans transition, les analyses biologiques de mon terrain agricole sont arrivées ! Elles me permettent de déterminer : la texture du sol, le taux de matière organique, le rapport C/N, la CEC pour Capacité d’échange Cationique, le taux de saturation, la réserve Utile, le pH, le taux de MO/Argile, le taux de Carbone, l’incidence de battance… Je vous ai perdu ? Et oui, le paysan doit être aussi être un scientifique ! On reviendra là-dessus !

Cependant, rien ne vaut l’analyse environnementale/terrain : tant qu’on n’est pas sur le terrain, on ne peut pas imaginer la qualité d’un sol ; seul l’expérience empirique fonctionne. Une agronome de Agrobio 35 devait venir sur mon terrain cette semaine, malheureusement, avec les fortes pluies que nous avons eu, le sol est encore gorgé d’eau et ne permet pas une analyse fine. C’est reporté ! J’attends ce RDV avec impatience afin de confirmer l’exploitabilité de la parcelle !

Prévisionnel et chiffre d’affaires,

Alors ça, c’est un exercice formidable ! Comment comprendre par les chiffres que le métier d’agriculteur - dans la plupart des cas - est un métier où l’on gagne difficilement sa vie et où l’on ne compte pas son temps. Plusieurs réponses, mais il me semble qu’il va falloir ajuster ces 2 variables à l’avenir :

Les charges sont trop élevées ?

C’est un peu le serpent qui se mord la queue. Tout investissement en matériel m’oblige à revoir mon modèle de production, car, plus mes charges sont importantes plus je vais devoir produire, et plus je dois produire, plus je vais devoir m’agrandir, et plus je m’agrandis, plus je vais devoir investir dans du matériel et avoir des charges.

C’est très simpliste comme raisonnement mais c’est pourquoi je me concentre essentiellement sur la diminution des charges dans ma future exploitation afin de maximiser ma valeur ajoutée, c’est pour cette raison que je souhaite m’installer progressivement. Malheureusement, le prix du matériel a augmenté de 20 à 30% ces 3 dernières années, ce qui fait que les petits systèmes maraîchers deviennent potentiellement des modèles économiques fragiles.

Les prix des produits sont trop bas ?

Concernant le prix des produits, saviez-vous que la part du budget des ménages dans l’alimentation est passé de 34% en 1960 à 20% aujourd’hui ? Cela ne signifie pas que l’on mange moins mais grossièrement, nous avons de plus en plus de dépenses qui ne sont pas liées à l’alimentation comme le logement mais nous avons aussi tout un autre tas de dépenses comme les abonnements téléphoniques, dont le paiement devient presque inaperçu grâce aux abonnements mensuels, et on en a des abonnements… Je nomme ça la “mensualisation de l’économie” et c’est assez surprenant, car nous sommes relativement tous prêts à négocier quelques patates en changeant d’étale de marché mais beaucoup moins notre fournisseur internet.

Si seulement les maraîchers pouvaient dupliquer ce système d’abonnement ! Et bien, ça existe, c’est les AMAP - Association pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne - je vous laisse découvrir ici. Je rajouterai l’option “panne maraîchère”, comme les fournisseurs d’Internet, pourrait-on avoir une option panne nous permettant de ne pas livrer nos légumes suite à une maladie fongique qui a détruit notre récolte mais quand même être payé ? 😅

Appel au matériel !

Vous avez une vieille tonne à eau, serre, pépinière, motoculteur, outil de jardinage, chariot, rouleau, râteau, et même des pavés, qui traîne dans votre sac à dos ? 😅 Discutons-en, je m’équipe encore et toujours ! Ah oui, et je cherche une.. enfin LA tarière-gouge qui me suivra pour observer mon sol tous les jours.

Vous êtes encore là ? 😱 Bravo !

Je ne vous cache pas que j’ai supprimé presque la moitié de ce que j’avais écrit ! Il y a énormément de sujets à aborder, de l’installation à l’alimentation en passant par climat, j’aimerais tellement vous raconter tout ce que je vis au jour le jour ! Mais si je ne m’arrête pas, je n’appuierai jamais sur le bouton envoyé… donc je m’arrête sans transition !

N’hésitez pas à me faire des retours en répondant directement à ce mail !

On se retrouve à la fin du mois pour le nouvel épisode !

Robin,

Pour les enfants de la Terre

La ferme de la Houle

Par Robin G

À qui s’adresse la ferme de la Houle ?

Aux habitants de la commune de Cancale qui souhaitent manger des légumes de leur commune mais pas que.

Aux curieux, à ceux qui se posent des questions, à ceux qui ont toutes les réponses, à ceux qui rêvent de changement, à ma génération, aux plus jeunes et moins jeunes, aux cols blancs et cols bleus, aux conseillers bancaires comme aux ouvriers du bâtiments, aux futurs agriculteurs, à ma femme, à mon fils qui lira surement ces lignes un jour !

Qui suis-je ?

Robin, la trentaine, ex-banlieusard dans le 78.

Je travaillais par le passé dans le secteur tertiaire, dans le monde des startups en tant que Growth Manager - manager de la croissance - derrière un bureau, devant un écran plus de 8 heures par jour, jusqu’au jour où j’ai tout arrêté.

Maintenant, je suis paysan-maraîcher (j’essaie) sur la terre de mes ancêtres, à Cancale, là où l’histoire de ma famille a commencé et où finira surement la mienne.

C’est l’histoire d’une révolution systémique.